Synthèse de la conférence

Vous trouverez ci-dessous la synthèse de cette conférence.

Vous pouvez accéder aux résumés des ateliers RH qui se sont déroulé à la Fondation Qualife le 24 avril 2018 :

  1. Comment dynamiser l’employabilité des 50 ans et plus en transition de carrière ? 

 

Café-contacts conférence : comment dynamiser l’employabilité des 50+ ?

Comment gérer l’employabilité des 50+ en transition de carrière et en emploi ? C’est la question qui a guidé les interventions et échanges de ce café-contacts conférence. Le directeur de Qualife 50+ Eric Etienne a ouvert la conférence en rappelant le but de ces café-contacts ouverts : des intervenant·e·s externes présentent à tour de rôle leur expérience en lien avec le thème du jour et le public est ensuite invité à poser des questions ou lancer le débat. Antoine Burret a présenté le 3DD - espace de concertation, mis à disposition par le Département de l’aménagement, du logement et de l’énergie. Le but de ce lieu est favoriser les échanges d’idées et d’apporter de nouvelles perspectives pour Genève. Un des points forts du 3DD est la mise en place d’un Wiki, une archive ouverte publique qui regroupe tous les documents liés aux activités qui s’y déroulent. Ainsi, vous pouvez dès maintenant retrouver des informations au sujet de tous les café-contacts ouverts organisés par la Fondation Qualife.

 

Présentation des workshops organisés en amont de la conférence

En guise d’introduction, deux représentantes de Qualife ont rapporté une synthèse de deux workshops qui ont eu lieu en avril à la fondation Qualife. Le but de ces deux ateliers était de réunir des professionnel·le·s des ressources humaines afin d’échanger sur l’employabilité des 50+. Plus précisément, un atelier s’est focalisé sur la transition de carrière alors que l’autre s’est penché sur le développement de l’employabilité en emploi. Les participant·e·s ont premièrement partagé leur expérience respective afin de dresser un constat de la situation actuelle, en citant notamment ce qui se fait au sein des entreprises. Dans un deuxième temps, la discussion s’est orientée vers la recherche de solutions. Nous vous présentons ici les points soulevés les plus importants, mais vous pouvez retrouver le détail de ces ateliers sur le site de Qualife et sur le Wiki du 3DD.

Qualife workshop

 

Qu’est-ce que l’employabilité ?

Selon l’OIT, c’est l’ « aptitude de chacun à trouver et conserver un emploi, progresser au travail et s’adapter tout au long de son parcours professionnel »

 

L’employabilité en transition de carrière

Après un licenciement ou durant l’élaboration d’un nouveau projet professionnel, comment assurer une employabilité cohérente avec le marché de l’emploi ?

 
Quels constats ? Quelles pratiques ?

Le premier constat, d’ordre contextuel, est un décalage entre l’individu et la société : on vit en bonne santé, on peut travailler de plus en plus longtemps, mais on devient « senior » de plus en plus tôt ! Cette catégorisation de « senior » – riche en a priori par ailleurs – dessert la cause des travailleuses et travailleurs de plus de 50 ans qui ont une réelle expertise à apporter à une entreprise. Lors d’un processus de transition de carrière, il y a cependant certains préalables à l’employabilité dont le 50+ doit s’assurer de remplir. Par exemple, avant toute chose, il s’agit de faire le deuil de son poste précédent et être capable de se projeter dans une vie professionnelle différente. S’ajoutent à cela une adaptabilité aux demandes du marché de l’emploi et l’estime de soi, indispensable pour se lancer dans un nouveau projet professionnel et convaincre !

Au sujet de la pratique des entreprises, les participant·e·s parlent de « tentatives de projets isolés », notamment car le personnel 50+ n’est pas encore intégré à la politique des RH (gestion de carrière). Les mesures existantes restent donc classiques : des entretiens de fin de carrière, une préparation à la retraite ou encore du mentorat intergénérationnel.

 
Quelles pistes de solutions ?

Mais qu’est-ce qui fait la différence aujourd’hui ? Être à jour sur les technologies est évidemment de plus en plus nécessaire, mais les professionnel·le·s des ressources humaines ont aussi parlé de l’attitude : les compétences sociales (ou soft skills) sont toujours plus valorisées. Malgré une digitalisation grandissante, le tact humain et une démarche positive dans le monde professionnel sont fondamentaux. Enfin, un·e 50+ en transition de carrière doit impérativement se mettre en mode « projet » : il ne faut pas passivement attendre que l’offre d’emploi de rêve apparaisse mais créer soi-même l’opportunité! En allant chercher des informations (par des entretiens d’information par exemple) et en variant ses méthodes de recherches d’emploi (activer son réseau, entre autres) multiplient les chances de retrouver une activité rapidement.

 

L’employabilité en emploi

Pour les personnes 50+ en emploi, les interrogations sont sensiblement différentes : comment assurer une évolution harmonieuse des collaboratrices et collaborateurs au sein de l’entreprise ?

 
Quels constats ? Quelles pratiques ?

Le premier constat est celui de la responsabilité partagée : conserver ou dynamiser l’employabilité est un rôle partagé entre l’employé·e et l’entreprise. Un deuxième facteur déterminant est la culture d’entreprise, qui établit une vision plus ou moins sur le long terme favorisant l’employabilité des collaboratrices et collaborateurs. Ensuite, le départ des 50+ est perçu comme une perte de savoir-faire par les professionnel·le·s des ressources humaines. Le rôle des RH est donc à la fois de sensibiliser son personnel mais aussi de lutter contre les a priori sur les 50+.

Concernant les mesures actuellement mises en place dans les entreprises, le son de cloche est proche de l’autre atelier : il existe quelques projets isolés mais les 50+ ne sont pas encore intégrés comme unité dans la politique RH. Des entretiens de fin de carrière, des ateliers de préparation à la retraite ou du mentorat intergénérationnel sont des pratiques existantes. Enfin, la formation continue constitue un point clé pour l’employabilité en emploi.

 
Quelles pistes de solutions ?

Dans la continuité des pratiques existantes, les participant·e·s suggèrent de favoriser la formation continue avec de réels plans de développement. Afin que celle-ci s’intègre dans une vision large, des bilans de carrière à certaines étapes importantes permettraient un suivi régulier et surtout d’agir en amont pour maintenir l’employabilité. Ces entretiens seraient aussi utilisés pour aborder la question de la retraite de manière plus progressive et naturelle. Au final, quelles que soient les solutions envisagées pour l’employabilité des 50+, elles s’inscrivent toutes dans une forme de travail qui évolue rapidement et s’imbriquent dans un changement global de l’emploi au sein des entreprises : la forme, la durée, le statut, les besoins et l’évolution des métiers.

Vous pouvez retrouver le détail de ces workshops sur le site de Qualife et la page dédiée sur le Wiki 3DD.  

Suite à la présentation de Qualife, les trois intervenant·e·s se sont succédé·e·s pour faire part de leur propre expérience.

 

Comment dynamiser l’employabilité des 50+ en transition de carrière ? (Annick Deschamps)

Annick Deschamps
 

Annick Deschamps est consultante chez Oasys Consultants SA où elle accompagne des personnes en transition de carrière, c’est-à-dire des gens qui ont perdu leur emploi. Les 50+ représentent la moitié de la population qu’elle coache dans un projet professionnel, mais pour elle, pas question de les traiter différemment : l’âge est un facteur certes, mais il ne signifie pas la fin de sa carrière professionnelle !

Annick Deschamps, spécialiste en transition de carrière, a présenté les étapes du parcours personnel et professionnel liées à un changement de profession.

 En effet, au même titre que la conjoncture, l’âge est un facteur non-maîtrisable : on ne peut pas le modifier à notre bon vouloir. Néanmoins, il existe d’autres facteurs importants dans la recherche d’emploi qui sont, eux, maîtrisables. Annick Deschamps a alors cité les éléments qu’elle juge nécessaires lorsque l’on doit se réorienter et se réinventer suite à un licenciement. La première étape est de réaliser un bilan professionnel général : il est crucial de « se connaître » et être au clair sur ses propres compétences pour déterminer la nature de son projet, autre point essentiel de la transition. Une fois que les objectifs sont fixés, il s’agit de définir les secteurs cibles de la recherche d’emploi : rien ne sert de s’éparpiller, il vaut mieux viser là où nos compétences seront les mieux accueillies. Annick Deschamps a aussi rappelé des éléments de base de la transition : l’importance de faire le deuil de son ancien emploi, être curieux, chercher des informations, s’engager dans les nouvelles technologies et ne pas se positionner en tant que victime. En ce sens, elle insiste elle aussi sur l’attitude de la personne en transition. Elle conseille de ne pas s’enfermer dans des a priori négatifs sur sa propre situation (« à mon âge, je ne retrouverai jamais d’emploi ! »). Pour contrer cela, le réseau est la meilleure arme ! (Ré)activer ses contacts et augmenter son activité de réseautage sont de réels outils pour rester actif, être au courant de l’actualité du monde du travail et, surtout, cela permet d’accéder au marché caché de l’emploi.

 

Charles Darwin, au service de l’employabilité (Alain Steinauer)

Alain Steinauer

 

Alain Steinauer est responsable de la coordination des unités ressources humaines pour UBS en Suisse romande et HR Business Partner (région UBS Romandie et UBS Valais). Depuis quelques années, il collabore activement à la mise en place d'un programme spécifique nommé « Apprendre tout au long de la vie », destiné aux collaboratrices et collaborateurs de 45 ans et plus.

Alain Steinauer a partagé son analyse darwinienne du marché de l’emploi et présenté les mesures mises en place chez UBS pour faire face à l’évolution continue du monde du travail.

 « Les survivants d’une espèce ne sont pas les plus forts, ni les plus intelligents, mais ceux qui s’adaptent le mieux au changement » : c’est avec cette citation de Charles Darwin (1809-1882) qu’Alain Steinauer démarre sa présentation. Provocation ? Pour lui, c’est plutôt un moyen de souligner que le changement est un phénomène normal que l’on peut et que l’on doit préparer. L’employabilité serait donc aussi en partie une question d’adaptation au changement : celles et ceux qui n’ajustent pas régulièrement leurs compétences ou montrent peu de flexibilité risquent l’éviction du monde du travail ! Pour illustrer comment l’entreprise peut encourager cette adaptation continuelle, le représentant d’UBS nous a présenté les trois dimensions essentielles liées à l'employabilité et mises en place au sein de son entreprise : la santé (check up annuel personnalisé, entretiens spécifiques sur la santé, formation pour se maintenir en forme, prévention du burnout, challenge 10'000 pas par jour, etc.), les compétences (formations, certifications, mentoring, mobilité) et la flexibilisation du travail (nouvelles formes de travail, programme « Timeflex 58+ »).

Le programme mis en place, « Apprendre tout au long de la vie », est proposé à toutes les collaboratrices et à tous les collaborateurs à partir de 45 ans (sur base volontaire). Cette offre de formation continue permet de rester compétitif sur le marché du travail. Entièrement financé par l’entreprise, ce programme comprend neuf modules comme par exemple : résoudre des problématiques complexes, training cérébral (apprendre à apprendre), digitalisation, etc. En investissant dans cette formation continue, l’employé·e peut ainsi rester à jour au sein de son entreprise ; et dans le cas de la perte de son emploi, les compétences acquises grâce à ce programme seraient un atout important pour retrouver un emploi.

Cet exemple illustre bien le rôle partagé entre l’employeur et l’employé(e) : chacune et chacun doit être investi·e dans le changement et l'employabilité.

 

Comment dynamiser son employabilité ? (Serge Sironi)

Serge Sironi © Georges Cabrera Tribune de Genève
 

Serge Sironi est fondateur de Capital Seniors, une société spécialisée dans le conseil en ressources humaines avec un accent particulier mis sur les cadres et les profils expérimentés. 

Dans la continuité de l’orateur précédent, Serge Sironi a lui aussi insisté sur la responsabilité partagée de l’employé·e et de l’employeur·euse : c’est une relation de « gagnant-gagnant ». Pour l’employé·e, le but est d’optimiser son parcours de formation initiale mais aussi d’agir de manière proactive pour se former tout au long de sa vie professionnelle. Quant à l’entreprise, elle doit créer les conditions propices à l’accès à la formation professionnelle continue. A ce propos, quelles sont les conditions qui permettent cette relation fructueuse ?

  • Une culture d’entreprise qui favorise le développement du capital humain. En ce sens, la direction d’entreprise doit avoir la volonté de mettre en place une ligne directrice pour l’employabilité
  • Un département des ressources humaines qui propose des solutions adaptées à chaque personne. Par exemple, un assessment ou un bilan de carrière peut être mis en place dès 45 ans mais aussi à toutes les étapes de la carrière.
  • Favoriser des équipes ou des binômes intergénérationnels et assurer la formation des managers pour mieux gérer ce type d’équipes

Enfin, Serge Sironi a aussi mis l’accent sur l’investissement personnel de l’employé·e pour sa propre attractivité. Chacun·e est responsable de son avenir professionnel et doit donc rester aux aguets des nouvelles attentes ou de l’évolution de son domaine d’expertise. Tout comme les autres intervenant·e·s, il insiste sur l’importance du réseau et le maintien d’une attitude positive : il faut être proactif et optimiste pour mettre toutes les chances de son côté !

 

Témoignage d’un parcours

Nicole A.
 

La dernière intervention de ce café-contacts a été celle de Nicole A. Elle a raconté sa propre expérience de réorientation professionnelle et de formation en emploi.

Nicole A. a illustré la question de la réorientation professionnelle à travers son propre parcours. En toute transparence, elle a évoqué la stimulation mais aussi les obstacles d’une telle démarche.

Nicole A. se forme initialement en psychologie et se spécialise en psychologie du travail. Suite à sa formation, elle travaille dans la réinsertion professionnelle avant de prendre un nouveau départ dans la traduction, suite à une formation dans ce domaine suivie à l’étranger. Dix ans plus tard, en 2014, à l’âge de 48 ans, elle commence à donner des formations au sein de son entreprise et se rend compte alors que la relation humaine – si présente dans sa précédente profession – lui manque. Ainsi, elle décide de revenir à son domaine initial en entreprenant une formation spécifique : un Master in Advanced Studies (MAS) en Gestion de carrières. Durant deux ans et demi, elle combine études et activité professionnelle au sein de son entreprise, où elle reste employée à 80%. Durant cette intense période de formation, Nicole A. vit un quotidien extrêmement dynamique : elle apprend, se présente à différents postes où elle obtient des entretiens, elle recontacte des connaissances, etc. Malgré son expérience riche et variée et son MAS, elle se heurte cependant à la réalité du marché du travail : des salaires de « débutants », des contrats à durée déterminée, des taux de travail réduits ou encore une compétition accrue, notamment en raison du nombre élevé de psychologues avec une expérience récente. Fait intéressant, Nicole A. explique que son âge n’est pas forcément un problème mais que c’est plutôt l’intervalle de temps (une quinzaine d’années) entre son expérience dans le domaine de la psychologie et ses postulations actuelles qui joue un rôle. Selon elle, le fait qu’elle doive encore être formée au sein d’une organisation avant d’être opérationnelle constitue un obstacle.

Au vu des conditions parfois contraignantes et suite à une réflexion personnelle sur sa motivation de départ, ses objectifs ainsi que son évolution professionnelle, Nicole A. trouve finalement un juste milieu entre sa position actuelle (traductrice) et son souhait de retrouver la composante « relations humaines ». Elle réoriente ainsi son travail en conjuguant la traduction et l’enseignement, cette seconde activité lui permettant de mobiliser des compétences récemment acquises et son envie de contact humain.

En effet, grâce notamment au financement de son employeur, elle suit une formation sur l’enseignement de l’anglais pour satisfaire les besoins de son entreprise. Entre temps, elle est sollicitée par des écoles ainsi que des particuliers pour enseigner lors de son 20% de temps libre.

En conclusion, la formation suivie par Nicole A. lui a permis de stimuler ses intérêts, ouvrir de nouveaux horizons et développer un poste à son image. Elle n’a cependant pas changé radicalement de domaine et rappelle à ce sujet qu’on ne doit pas sous-estimer les contraintes liées au début d’une nouvelle activité ainsi que celles d’ordre financier. Enfin, il s’agit également de bien se connaître avant d’entamer une telle démarche.

 

Les réactions du public et débat

Conférence Qualife
 

Plusieurs participant·e·s à ce café-contacts ont réagi aux interventions et ont fait ressortir les points suivants :

  • Il manque une réelle prise de conscience politique sur l’emploi des 50+. Des politicien·ne·s devraient être présent·e·s à ce type d’événement et œuvrer pour des mesures spécifiques.
  • La croissance de l’entreprise se heurte parfois à l’envie de décroissance de l’employé·e. Les entreprises ne conçoivent pas toujours qu’un·e employé·e puisse aspirer à un poste « moins élevé », avec moins de responsabilités pour favoriser la transmission de savoirs et gentiment laisser sa place.
  • Certains discours sont culpabilisants, notamment sur le fait que c’est à l’employé·e de se remettre en question, de se former, d’innover. Certain·e·s ont fait tout juste et se retrouvent tout de même licencié·e·s. L’entreprise et les patron·ne·s doivent aussi se responsabiliser.
  • Il y a un décalage entre la culture managériale des PME et la mentalité des individus. Il y a des gens créatifs, autoentrepreneurs mais la culture managériale n’est pas disposée à aller dans le sens du développement de l’employabilité.

 

Présentation

 

Revue de presse

https://www.tdg.ch/geneve/actu-genevoise/cafecontacts-retrouver-emploi/story/23441493

Thème(s)
Nature de la ressource
Territoire(s) concerné(s)